Pourquoi un grand capteur pour la photo de portrait, c’est quand même franchement mieux ?

Dans l’article précédent, je vous ai parlé des raisons qui font qu’un compact répond aux besoins les plus courants. Je vous propose d’aborder maintenant le cas spécifique des photos « rapprochées » de type portrait et de voir pourquoi l’utilisation d’un appareil à « grand » capteur fait toute la différence.

 En photo de portrait, tout le jeu consiste d’une part, à isoler le sujet par rapport à son environnement (sujet net sur fond flou) et d’autre part à minimiser les effets de déformation dus à l’objectif (fondamentale, dans le cas d’un visage, mais aussi en packshot ou les proportions des produits doivent être fidèlement représentées).

Pour une distance de mise au point donnée, plus on augmente la focale, plus les plans sont compressés (le fond semble se rapprocher du premier plan et les déformations sont moins marquées) et plus les profondeurs de champ sont réduites (le fond, même s’il est encore proche du sujet, sera déjà flou). En dessous de 35 mm, ça devient compliqué de faire un beau portrait, car d’une part les déformations des visages deviennent inacceptables et d’autre part, vu que le photographe se tient à une distance de 2 à 4 mètres de son sujet environ, la profondeur de champ devient trop grande pour pouvoir facilement « flouter » l’arrière plan. Il devient alors difficile d’isoler visuellement le sujet par rapport au fond.

-Bon, OK pour utiliser une longue focale donc, mais quel est le rapport avec la taille du capteur ?

-Et bien c’est de la faute du « crop factor ».

-Le quoi ? C’est une nouvelle émission de téléréalité à gros budget ?

-Mais pas du tout. Il s’agit d’un terme qui exprime le fait qu’à chaque couple « longueur focale/taille de capteur » est associés un certain « angle de champ ».

Cocktails

Autrement dit, pour un objectif d’une longueur focale donnée, l’angle de champ associé (le cadrage qu’il permet) sera différent selon la taille du capteur de l’appareil sur lequel il est monté.

Ce qui est un peu déroutant, c’est que la question ne se posait pas du temps de l’argentique. Quelque fut l’appareil utilisé, compact ou reflex, le négatif était généralement de format 24X36. On pouvait dire par exemple « 50 mm est la focale qui permet de travailler avec le champ de vision humain ». Nous avions pris l’habitude de « penser » les différentes longueurs focales en terme d’angle de champ. Mais il s’agissait là d’un raccourci, car déjà à l’époque, l’angle de champ d’un 50 mm n’était pas le même sur un reflex 24X36 et sur moyen format (Hasselblad ou Mamiya par exemple). Pour le grand public cette question ne se posait pas puisque il n’avait pour ainsi dire pas accès au moyen format, vu le prix ébouriffant des appareils à l’époque.

Mais nous vivons maintenant à l’ère du numérique et la taille du capteur n’est quasi pas normée. Du coup, il n’est plus du tout pertinent de penser la longueur focale en terme d’angle de champ. Néanmoins les habitudes restent et aussi vrai qu’il est encore fréquent de trouver des affichages en francs, on entend fréquemment « le 35 mm sur un APSC est l’équivalent d’un 50 mm sur un full frame » …

Ce n’est vrai que du point de vue de l’angle de champ (du cadrage donc) mais pas des autres propriétés associées à la focale, telle que la compression des plans !!! Un 35 mm reste un 35 mm, quelque soit le boîtier utilisé. Ses propriétés optiques restent les mêmes, seul le cadrage variera.

Ce point précis est source de beaucoup de confusion dans l’esprit du public qui peut s’imaginer que travailler au 35 mm sur un APSC équivaut en tout point à travailler avec un 50 mm sur un full frame. Si c’était vrai, pourquoi passer au full frame ? Pour la qualité d’image ? Hummmmmm …. Pas sûr. Il y a bien une autre raison et la voici.

Pour offrir un « cadrage » similaire, les constructeurs sont contraints de monter des objectifs de focale plus courtes sur leur appareil à petit capteur… pour compenser l’effet « crop ».

Ainsi par exemple, pour retrouver le champ « vision humaine », on met un 85 mm sur moyen format, un 50 mm sur un full frame et un 35 mm sur un APSC et ainsi de suite, si bien qu’on se retrouve à mettre des objectifs de focale « grand angle » sur des compacts lorsqu’on veut « un équivalent 50 mm 24X36. C’est pour ça qu’avec un très petit capteur, on a une grande profondeur de champ et c’est accessoirement la raison pour laquelle avec un compact, l’acuité de la mise au point n’est pas vraiment un problème.

En guise de synthèse et pour en revenir à nos moutons (on peut faire de très beaux portraits de moutons), il suffit de faire le raisonnement inverse et de se dire que pour un cadrage donné, si je veux pouvoir jouer sur ma profondeur de champ et éviter les déformations de mon modèle, j’ai tout intérêt à utiliser un objectif de focale longue et du même coup, si je ne veux pas devoir souffrir du « crop », le monter sur un boîtier ayant le capteur le plus grand possible.

S’il est vrai que le 85 mm est la focale idéale pour du portrait, c’est bel et bien pour des raisons purement « optiques » de compression de plan et à condition d’utiliser un moyen format. Car pour obtenir un cadrage équivalent sur un portrait “plein pied”, le photographe devra se tenir à environ : 9 mètres de son sujet avec un APSC,  6 mètres avec un full frame, et à 2,4 mètres seulement avec un moyen format. Pour du portrait, c’est le moyen format qui gagne, car à 9 mètres de distance, on ne dirige pas son modèle de la même façon qu’à 2,4 mètre.

En conclusion, lorsque qu’on veut faire de la photographie de portrait, il est plus confortable d’utiliser un boitier« full frame » ou mieux un moyen format, lorsqu’on veut s’affranchir de toutes les contraintes techniques.

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